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Parc Simone Veil : Cours du Château des Ducs d’Alençon et ancienne prison (1830-2011)

Structure : Atelier Strates en Strates
Sandra LEYOUR

Requalification des anciennes cours de la prison du Château des Ducs d’Alençon.
En 2011 la ville d’Alençon s’est portée acquéreur de ce patrimoine en cœur de ville connu des habitants mais pour tous mystérieux puisque lieu de réclusion depuis 1830.
Se sont posées les questions de révéler un lieu chargé d’Histoire et d’histoires, de susciter l’intérêt pour toutes les formes patrimoniales que peuvent avoir un château ET une prison, de proposer de nouveaux usages lorsque d’un coup les murs tombent.
Lorsque les portes du Château des Ducs se sont ouvertes pour la première fois, l’équipe reçue un violent choc d’émotions contrastées. La première des émotions, une jubilation enfantine, a été de fouler un lieu absolument méconnu, voire occulté, au plus intime du cœur d’Alençon. Comme un privilège. Puis très vite, vint la prise de conscience que, pendant presque 200 ans, des hommes avaient vécu reclus ici et eu comme seul horizon d’étroites coursives ou de modestes cours ceintes de très hauts murs. La jubilation fît place à l’émotion. Tout y est « volume ». L’espace tient entre un sol stérile et un ciel mouvant. On y expérimente concrètement le sentiment brutal d’enfermement. Même les rumeurs de la ville y parviennent étouffées et seules les ombres, intenses, projetées par les murs, marquent le temps qui passe. L’esprit se met alors à vagabonder dans une sorte d’évasion mentale. Avec pour objectif d’ouvrir ce lieu à tous, le besoin de partager et de faire ressentir aux futurs visiteurs du parc de telles émotions, rares et puissantes, s’est très vite imposé. Tout comme s’est imposé une certaine humilité vis-à-vis d’un lieu si intrinsèquement fort. Depuis le parvis du Château, nous invitons le visiteur à pénétrer les cours de la prison à travers une brèche, tranchée dans le mur d’enceinte, pour y découvrir un espace composé de deux cours très minérales ordonnées autour de la tour de surveillance recouverte d’écailles métalliques. D’un côté les hautes tours du Château pèsent sur le visiteur, de l’autre, un mur de refend existant, abaissé, laisse percevoir les frondaisons des rives de la Brillante. En s’approchant, on découvre un espace plus doux, plus végétalisé, composé en terrasses et en espaces offrant des bancs et des jeux revisitant le thème de l’évasion. Dans un étroit corridor, s’offre une immersion complète dans le patrimoine pétré : lorsqu’une brume générée artificiellement retombe, le sol en schiste noir reflète la Tour du XIIIème siècle. La « pierre » se referme alors autours de soi et offre une nouvelle expérience sensible tout en magnifiant le patrimoine médiéval. Dans ces lieux plus intimistes, plus poétiques, le visiteur est pleinement en retrait du rythme urbain, hors du temps. De nuit, la brèche et la tour de guet sortent de la pénombre par un délicat jeu de « lumière tissée » dans une maille d’acier comme autant d’évocation de la détention. Dans une dernière expérimentation spatiale et sensorielle, le visiteur « s’enfonce » dans une fissure de la rive, enjambe la Brillante pour déboucher dans le Jardin Expérimental, et peut continuer son périple à travers les parcs Alençonnais par le Jardin des Promenades. Dès la réponse à appel d’offre, le Maître d’ouvrage aura été réceptif à l’approche sensible et respectueuse du patrimoine que nous lui proposions, quitte à complètement revoir son cahier des charges qui prévoyait l’arasement de tous les murs. Le Parc Simone Veil a obtenu le prix ACEtylène 2020.

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